Le Gras peut-il être bon?

Notre monde moderne chérit l’idée qu’il existe des “super-aliments” (huile de foie de morue, resvératol, extrait de betterave…). Parmi eux, les oméga (-3, -6 ou -9) s’imposent dans la presse et dans les vitrines des pharmacies… comme des élixirs de santé efficaces sans que nous n’ayons rien a changer à notre hygiène de vie. Sous l’égide d’une mythologique lettre grecque ils regroupent une famille d’acides gras insaturés découverts il y a une trentaine d’années et validés aujourd’hui par les japonais, les crétois et tous les eskimos de la planète. Si bien qu’en 2016, la graisse de poisson affiche une notoriété inédite ! Si leur nom évoque plus des codes secrets du FBI que des nutriments essentiels, on peut légitimement se demander s’il s’agit effectivement de molécules miracle ou bien d’une nouvelle poudre de corne de rhinocéros ? Essayons de nous y retrouver dans la surenchère informative qui les entoure.

Les matières grasses sont des mosaïques d’acides gras caractérisés par leur « saturation en atomes d’hydrogène ». Les w3 et les w6 font partie des « poly-insaturés » indispensables à notre équilibre. Comme le corps humain est incapable de les synthétiser il faut les puiser dans l’alimentation pour bénéficier de leur activité biologique.

Les w6 participent au maintien de l’intégrité de l’épiderme et à la fonction reproductrice ; ils ont un effet hypocholestérolémiant en diminuant le LDL cholestérol ; ils activent le système immunitaire et la réponse anti-inflammatoire.

Les w3 participent au développement de la rétine, du cerveau et du système nerveux, au maintien des fonctions cognitives ; ils ont une action anti-thrombique, hypo-triglycéridémiante et anti-arythmique. Un apport suffisant d’w3 contribue donc à la prévention des maladies cardio-vasculaires et neuro-vasculaires.

Mais pour être utilisés de manière optimale, w3 et w6 doivent être apportés dans de bonnes proportions. Le rapport Oméga-6 / Oméga-3 ne devrait pas excéder 5/1. En pratique, nous consommons 15 fois plus d’oméga-6 (en abondance dans la viande, l’huile d’arachide, de tournesol, de maïs, de soja, produits laitiers, graines de sésame). Or en trop grande quantité, ils nuisent au métabolisme des w3 dont nous manquons ! Pour booster les apports en Oméga3, nous disposons de tout l’éventail nutritionnel nécessaire pour couvrir nos besoins. Cuisinez à l’huile de colza ou de noix et prévoyez du poisson gras (saumon, hareng, sardines, crustacés) 2 à 3 fois par semaine. Le recours à des gélules bénéficie surtout à l’industrie pharmaceutique qui propose des cocktails d’oméga -3, -6 et -9 « dans des proportions idéales » … alors que nous consommons déjà beaucoup trop d’oméga 6 !

Les oméga-9 de l’huile d’olive, de l’avocat, des fruits secs oléagineux, des noisettes, des pistaches sont mono-insaturés. A l’inverse des w3 et des w6, ils ne sont pas essentiels car nous pouvons les synthétiser naturellement. Ils sont aussi bien plus stables à des températures de cuisson élevées. Notre consommation quotidienne devrait idéalement représenter la moitié de nos apports totaux journaliers en matières grasses pour agir favorablement sur le cholestérol sanguin, la sensibilité à l’insuline, la tension artérielle.

Ne tombez donc pas dans le piège de « l’ultra-sain » ou de la guerre au gras. La clé est d’éviter les graisses saturées ou trans, présentes principalement dans les produits transformés. Les omégas, en revanche, vous pouvez en faire vos choux gras !

Francine Joyce – Diététicienne - Nutritionniste